Parution du Trait d’union (mai-juin 2025)

Déjà deux mois sont passés depuis le dernier numéro de notre journal paroissial. Deux mois avec comme point d’orgue la célébration de Pâques et l’annonce de la victoire de l’amour sur la mort. Nourri·es de cette victoire, nous marchons maintenant vers l’été (même si les presque 30° de ce vendredi 2 mai peuvent nous laisser croire que nous y sommes déjà, ce n’est qu’un avant-goût). Deux évènements paroissiaux marqueront cette fin de printemps :

  • un rendez-vous habituel d’abord, avec notre fête paroissiale le 17 mai à 18h30 suivi d’un culte festif suivi d’un apéritif le lendemain à 10h ;
  • un nouveau rendez-vous ensuite, avec notre premier vide-grenier le 14 juin de 10h à 18h.

Pour lire ce numéro, n’hésitez pas à le télécharger ici (en gardant à la mémoire que les numéros précédents sont disponibles ici).

Pour rappel, vous pouvez vous y abonner gratuitement (en papier si vous êtes résident·e d’Ostwald, en version numérique partout) en nous écrivant à contact@protestants-ostwald.fr.

Notre premier vide-grenier m’a rappelé de bon souvenir d’enfance de chinage, et m’a inspiré une petite méditation autour d’un schlager des brocantes : la machine à écrire.

Édito : Machine à écrire et cœur nouveau

Lorsque, enfant ou jeune adolescent, je visitais les braderies et les vide-greniers, il y avait un objet qui me fascinait davantage que les autres : les machines à écrire. Elles étaient nombreuses, souvent accompagnées d’une valisette pour les transporter facilement, et il fallait que je sente fortement le regard de mes parents dans mon dos pour résister à l’envie d’aller appuyer sur les touches ! Et aujourd’hui que je suis parent, je retrouve chez mes enfants le même intérêt — et la même envie presque irrépressible d’aller appuyer sur les touches — lorsque nous allons quelque part où une ancienne machine à écrire sert de décoration. Et pour être tout à fait honnête, c’est en grande partie pour leur montrer le bon exemple que je résiste moi-même à la tentation…

Je ne dois pas être le seul, puisqu’en me promenant sur Internet, je suis tombé sur un livre de Richard Polt, un philosophe américain, sorti en 2015 : The Typewriter Revolution (« La révolution de la machine à écrire »). Contrairement à ce qu’on pourrait imaginer en lisant ce titre, il ne s’agit pas d’un livre qui retrace la révolution que fut historiquement l’introduction de la machine à écrire. C’est une apologie de l’utilisation de la machine à écrire au XXIe siècle.

La machine à écrire fut, de la fin du XIXe à la fin du XXe siècle, une invention qui permit la standardisation des écrits, et aux secrétaires et dactylographes de gagner du temps. Elles étaient inventées et construites par des visionnaires qui voulaient changer la société, des véritables utopistes : « gagner du temps, c’est prolonger sa vie » disait une publicité pour les machines Remington. La machine à écrire était davantage qu’une innovation, c’était la promesse d’une vie dans laquelle tout allait plus vite, tout était plus efficace, laissant plus de temps pour vivre vraiment.

Et elle a tenu sa promesse d’efficacité, jusqu’à ce qu’une autre machine, encore plus efficace, la détrône : l’ordinateur. Produire un journal paroissial comme le Trait d’union demande toujours beaucoup de temps et d’énergie (merci infiniment à Chantal, Simone, et aux porteuses et porteurs !), mais bien moins qu’en 1979, date du premier numéro.

Mais la machine à écrire puis l’ordinateur ont-ils tenu leur autre promesse, celle de « prolonger la vie » ? Pour certaines et certains, dont Richard Polt, la réponse est non. Nous produisons bien plus en travaillant autant, mais nous ne travaillons pas moins, et même nos moments de loisirs ne sont plus de vrais moments de pause, d’arrêt. Et depuis 2015, la chose s’est encore accélérée, avec les « influenceurs » et « influenceuses » qui commercialisent jusqu’à leur vie privée. Tout doit être rentable, monétisé.

Aujourd’hui, utiliser une machine à écrire, c’est accepter de faire les choses non pas le plus efficacement possible, mais en prenant le temps de savourer l’action elle-même. C’est comme cultiver un potager plutôt qu’acheter ses légumes, et les cuisiner plutôt qu’acheter des plats déjà prêts. C’est vivre l’instant présent plutôt que chercher absolument à atteindre un objectif, c’est prendre du plaisir dans l’action plutôt que dans son résultat. Écrire à la machine à écrire, c’est écrire pour écrire, plutôt que pour être lu.

Le (timide) retour de la machine à écrire témoigne d’un grand besoin de vivre pour de vrai. Or, c’est là toute la promesse de Pentecôte, et plus généralement de l’Évangile. Nous sommes appelées et appelés à vivre pour vivre, à recevoir notre vie. Nous croyons en un Dieu, le Père, qui nous a créés, un Dieu, le Fils, qui nous sauve et nous aime tel que nous sommes, un Dieu, l’Esprit-Saint, qui met en nous la force de vivre différemment. Vivre en chrétienne ou chrétien, ce n’est pas appliquer une méthode, travailler dur pour Dieu. Vivre en chrétienne ou chrétien, c’est s’arrêter, c’est recevoir. C’est faire les choses non pas pour mériter quoi que ce soit en retour, avec un objectif, c’est faire les choses pour elles-mêmes.

L’Esprit-Saint ne nous est pas donné comme une force pour que nous fassions, mais comme un encouragement à nous laisser faire. Un cœur nouveau, un cœur qui reçoit, et puis un cœur qui donne pour donner, et pas pour recevoir, puisqu’il a déjà reçu. Prier non pas pour que la prière soit exaucée, mais simplement pour prier. Agir même en sachant (parfois) que c’est futile, que les vents contraires sont (parfois) trop forts, mais simplement pour agir. C’est difficile ! Éprouvant, parfois désespérant ! Mais c’est aussi libérateur, car il n’y a plus de jugement possible, quand tout a déjà été jugé.

Mais cela ne veut pas dire non plus chercher l’inefficacité. C’est ce que j’aime dans cette image de la machine à écrire. Une machine à écrire c’est quand même efficace, et personne ne propose de tout abandonner pour revenir au marteau et au burin sur des tablettes de pierre. La machine à écrire, c’est un entre-deux, qui ne cherche ni l’efficacité absolue ni l’inefficacité absolue, ou ce que nous faisons perdra son sens.

Alors peut-être que, lors du vide-grenier de notre paroisse (voir p. 4) je trouverai une machine à écrire et, qui sait, peut-être que je rédigerai le prochain édito avec ? Et, peut-être que, d’une manière inattendue, j’y trouverai l’inspiration de mener une vie plus évangélique.

Bonne lecture !

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